L’intelligence émotionnelle et l’auto-détermination liée à une motivation intrinsèque ont, nous l’avons vu, un effet direct sur la réussite des actions envisagées, le développement du leadership et l’engagement productif. Le monde du sport de haut niveau et celui de l’entreprise se rejoignent sur la recherche de la performance dans un environnement compétitif. Aller toujours plus loin, plus vite, plus haut. Gagner des secondes ou des parts de marché, satisfaire des clients ou faire vibrer des foules, motiver une équipe lors d’un match ou pour répondre à un appel d’offres, décider dans l’incertitude, tous ces challenges peuvent devenir possibles grâce à une compréhension du rôle des émotions dans le fonctionnement cognitif.

Ce qui active le cerveau a donc une influence sur les performances. La conscience de soi est un des ingrédients de l’intelligence émotionnelle. D’autres composantes sont la vision positive des objectifs et une perception optimiste qui vont concourir à ouvrir une voie mentale capable de relever les défis et de créer les conditions d’un accomplissement que la seule mise en action des capacités n’aurait pas permis.

On parle souvent de positivisme pour désigner cet état d’esprit. Il s’agit d’une erreur communément commise, car le positivisme est une théorie philosophique d’Auguste Comte qui se réclame de la seule connaissance des faits vérifiés par l’expérience pour affirmer une vérité. C’est en fait la positivité qui détermine le caractère de l’esprit positif.

Savoir positiver est une qualité majeure des managers efficients et des athlètes confirmés qui leur permet de déceler le meilleur dans leur environnement et leur entourage afin d’appréhender au mieux les occasions, et de saisir les opportunités. L’anticipation positive est nécessaire à la prise de risque, à la persévérance dans l’effort, à l’analyse des contre-performances – que d’autres nommeraient échecs – et à l’amélioration continue. Pourvu de cette aptitude, le performeur est en capacité de faire confiance au pouvoir de sa volonté et de son action. Il profite de l’incertitude pour réfléchir. Il enregistre les difficultés comme des apprentissages et les revers comme des expériences.

 

Positiver pour se mettre en action et fédérer les équipes

1er décembre 1991, le palais des sports de Gerland scande Saga Africa pour saluer l’équipe de France masculine de tennis qui vient de remporter la coupe Davis pour la première fois depuis 1932. L’optimisme et le management positif de Yannick Noah, alors tout jeune entraîneur, avaient transcendé les joueurs français.

À l’instar de celui qui fera à nouveau triompher la France lors de la coupe Davis en 1996, en 2017 et lors de la Fed Cup en 1997, un manager en entreprise à un devoir d’optimisme envers ses collaborateurs. Il génère ainsi une ambiance propice à l’accomplissement des missions ; il impulse l’énergie indispensable aux performances. D’ailleurs, comme le souligne Cécile Déjoux, professeure de gestion au CNAM, « le leader résonnant est capable d’inspirer les autres, en étant vigilant et attentif à l’environnement, en créant un état d’esprit positif grâce à son optimisme et en faisant preuve d’empathie et de compassion. » Des entreprises évaluent désormais « l’énergie positive » de leurs talents et non plus seulement l’atteinte de résultats. (Entreprise & Carrières, no 1187, 2014)

Que ce soit sur un stade ou dans une salle de réunion, une attitude positive laisse un espace de liberté qui pousse chacun à écouter l’autre, à lui faire confiance, à réfléchir, à créer, à se positionner, etc. Se faisant, elle est source d’initiatives et de bien-être personnel et collectif. Elle place la confiance au-dessus de l’incertitude conduisant managers et athlètes de haut niveau à affronter, avec davantage de succès, les défis. De la même façon, cette attitude va mettre en place les conditions d’une autonomie conditionnant la motivation nécessaire à la détermination des équipes.

 

Attirer le positif et la performance par son attitude mentale

Les pensées influencent l’efficacité et la performance. Positives, elles favorisent l’aboutissement de grandes actions. Négatives, elles génèrent la peur et constituent un frein indéniable. Certains nomment cela « la loi de l’attraction ».

Ceux qui performent savent transformer leur dialogue intérieur pour davantage de résultats. « Si tu perds ce point, tu vas perdre le round et sûrement le match ! » se transforme chez eux en une pensée similaire à celle du footballeur international Luis Fernandez : « Le secret pour gagner : une action après l’autre, une balle après l’autre, un match après l’autre, une saison après l’autre » et « Si la signature échoue, nous allons manquer de trésorerie, et il va être difficile de payer les salaires ce mois… » devient « Notre société est particulièrement performante sur cet aspect. La qualité proposée justifie le prix. Nous avons une marge de négociation de 5 %. »

Comment, lors d’un match de poule contre le Nigéria de coupe du monde féminine de 2019, Wendie Renard, a-t-elle pu tirer — et réussir — un second penalty, alors qu’elle venait d’en manquer un ? Ses coéquipières et elle-même ont positivé sur ses capacités, faisant taire tout doute en elle… et sur le terrain. La place des préparateurs mentaux est ainsi devenue presque aussi importante dans la sphère sportive que celle des préparateurs physiques. De façon similaire, des structures comme PepsiCo France, MMA ou Cisco France ont développé pour leurs cadres ou leurs managers des sessions de formation ou des programmes de co-coaching ayant pour objet la gestion des émotions (Entreprise & Carrières, no 1187, 2014), point abordé dans un précédent article.

 

Positiver permet d’analyser pour recommencer

Être positif, ce n’est pas être un doux rêveur ni ignorer les problèmes. C’est au contraire être pleinement conscient des difficultés, tout en les appréhendant sereinement, à leur juste niveau en ayant la conscience de ses capacités. Le prisme de la pensée positive offre la possibilité, d’expérimenter, de progresser, de tenter toutes actions nécessaires pour réussir. « J’ai raté 9000 tirs dans ma carrière. J’ai perdu presque 300 matchs. 26 fois, on m’a fait confiance pour prendre le tir de la victoire et j’ai raté. J’ai échoué encore et encore et encore dans ma vie. Et c’est pourquoi j’ai réussi. » confiait le basketteur Michael Jordan.

Les leaders en entreprise, tout comme les sportifs de haut niveau, ne renoncent pas face à une épreuve. Ils la transforment en un enseignement, ils imaginent comment franchir l’obstacle et, s’ils n’y parviennent pas sur le coup, quelle autre stratégie ils mettront en place à l’avenir. Débriefings et feedbacks positifs font progresser athlètes comme managers.

Cette évaluation des expériences, cette manière de considérer les obstacles comme des challenges, de concentrer ses ressources sur une démarche positive fait partie du processus de résilience que nous aborderons dans notre prochaine newsletter.